“Bienvenue dans notre base arrière !”, ainsi Michel Desportes accueille-t-il le visiteur, sur le toit de l’ancienne usine Spring Court, où se développent les jeunes pousses destinées à s’épanouir sur les sites de Lachambeaudie (12e) et Paris Bourse (2e), dans le cadre des Parisculteurs. À sa manière, ce toit d’usine perpétue la tradition agricole parisienne : pendant la seconde guerre mondiale, un élevage de carpes y avait en effet élu domicile pour faire face aux restrictions alimentaires. Aujourd’hui, le réservoir est vide mais la toiture accueille désormais les cultures de la jeune start-up Aéromate…
Fondée par Michel Desportes
en 2015 avec Louise Doulliet et Théo Manesse, la société Aéromate utilise l’hydroponie pour cultiver des plantes aromatiques. Pour mieux comprendre la
technique, direction un dispositif de démonstration : plantés à l’intérieur de rails en PVC blanc, basilic et menthe voient leur racines
baignées par un courant d’eau en
mouvement, ce qui booste leur croissance. “Grâce
à ce système, les végétaux poussent
trois à quatre fois plus vite que les plantes en terre”, précise Michel Desportes.
Débordant sur la rambarde, une menthe de taille généreuse semble presque acquiescer : “L’année dernière, les plantes recouvraient le toit, pour un système qui ne
consomme que 45 watts, l’équivalent d’une ampoule électrique.” Pour le moment, les plantes de l’entreprise Aéromate sont encore à l’état de jeunes pousses. Dans une véranda réchauffée par le soleil, les cagettes
ont envahi les tables: ici bourrache au doux goût de concombre, ou Mertensia maritima – un gout d’huître, frais
et délicieux en bouche – croissent
tranquillement.
Avec un catalogue d’une centaine
de variétés, Aéromate ne cesse d’essayer de
nouvelles plantes. Ici, c’est
donc l’espace de test, où les plantes minuscules sont
mises à germer, avec plus ou moins de succès : “Le shiso peine encore à partir: c’est vraiment
dommage, car c’est une
plante délicieuse en pesto dans les pâtes !”
Toutes les plantes sont cultivées en godet, pour que les racines se mettent
bien en place avant la grande transplantation: posés au-dessus des locaux
de la RATP, les 450 m2 de toiture de la ferme Lachambeaudie attendent ainsi
leur 5 000 plants d’aromatiques. “L’électricité est déjà là, mais il
reste toute la tuyauterie à mettre en place, ainsi qu’à transvaser toutes les
plantes.”
Une fois l’installation finalisée, la start-up enchaine déjà avec un
nouveau projet, cette fois-ci sur les toits de l'immeuble Paris Bourse, rue Réaumur. Au-dessus de bureaux
du propriétaire Tishman Speyer, des systèmes de cultures hydroponiques sont
attendus sur 180 m2 de toiture. A noter que les savoureux végétaux
seront cette fois-ci intégrés à des paniers, grâce à un partenariat avec des maraichers
bios d’Île-de-France. Légumes et aromates seront ainsi proposés aux salariés du
bâtiment mais aussi aux Parisiens, via le réseau AMAP et La Ruche Qui Dit Oui !
En attendant, rendez-vous début mai, donc, pour éviter les derniers coups
de gel, qui pourraient être fatals aux jeunes plantes. Durant l’année, petite aromatique deviendra grande : “Nous laissons les même plants sur toute la saison, jusqu’à octobre. À la fin, le basilic
atteint une taille impressionnante !” s’enthousiasme Michel Desportes. En hiver, pourpier d’hiver, cresson ou artichaut prendront le relais, pour le plus grand plaisir
des gourmands.